L’autoconsommation collective, deux challenges et une opportunité pour l’IoT

Un article du Journal du Net publié le 8 janvier 2024.

 

Dans l’autoconsommation collective, l’IoT doit assurer à la fois le pilotage des consommations, mais aussi l’équilibrage entre les bâtiments.

 

L’engouement pour l’autoconsommation photovoltaïque ne faiblit pas, au contraire, elle s’étend à l’échelle de plusieurs bâtiments. C’est ce qu’on appelle l’autoconsommation collective (ACC). Encouragées par la réglementation, différentes constructions peuvent se regrouper dans un rayon de 2 kilomètres, 10 en zone rurale, pour se partager l’énergie produite localement. Une personne morale organisatrice (PMO) doit gérer les volets juridique, organisationnel et fonctionnel du réseau créé. « L’énergie est le deuxième poste de coûts des entreprises, c’est devenu un sujet sensible et l’autoconsommation suscite de plus en plus d’intérêt, d’autant que cela permet de décarboner l’activité », confirme Jean-Marc Vauguier, président de Z#bre, entreprise française de digitalisation des espaces de travail. Mais pour que cela fonctionne, il faut déterminer quels équipements de quel bâtiment en a besoin en priorité, et quand. Un usage pour lequel la technologie IoT est tout indiquée. Elle doit alors relever deux défis.

Le premier challenge est le pilotage des consommations. « L’objectif d’une démarche d’autoconsommation est de réduire la facture énergétique. L’énergie la moins chère est celle que l’on ne consomme pas, les objets connectés doivent servir dans un premier temps à optimiser les consommations pour en supprimer et à mesurer celles auxquelles seront allouées les énergies renouvelables », précise Alexandre Fund, directeur smart building de l’ESN Kardham Digital, qui assure que le pilotage des consommations permet de réaliser jusqu’à 30% d’économies d’énergie.

 

Le deuxième volet traité par l’IoT dans l’autoconsommation collective est l’équilibrage des consommations entre les participants. « Il vaut mieux créer une PMO entre bâtiments complémentaires, par exemple entre une école, des commerces et des habitations. Mais aussi de disposer de foncier pour ajouter une éolienne », estime Alexandre Joly, responsable du pôle Energie du cabinet de conseil Carbone 4. Ce sont alors les données fournies par les objets connectés qui vont permettre de déterminer, via une plateforme d’énergie management ou un building operating system (BOS), quelle énergie allouer à quel bâtiment. Pour Alexandre Fund, l’équilibrage entre différents bâtiments ajoute 10% à 25% d’économies supplémentaires au pilotage des consommations, ce qui permet une réduction globale des consommations de plus de 50%.

Pour répondre aux besoins des entreprises, l’ESN Kardham Digital et la société de conseil spécialisée dans les énergies renouvelables Wise-NRJ se sont associés pour fournir une offre dédiée à l’autoconsommation collective. Une première expérimentation est en cours dans l’Isère, à Sassenage, avec une PMO regroupant un restaurant, un hôtel, un garage et un imprimeur qui sont tous équipés de panneaux photovoltaïques depuis octobre dernier et vont se partager cet hiver des puissances produites par le solaire comprises entre 200 et 500 kilowatts crête.

« L’initiative a été poussée par l’hôtelier, qui a vu sa facture énergétique exploser de 30 000 euros à 100 000 euros annuels. Le chauffage, la ventilation et la climatisation pourront être pilotés par IoT en fonction de l’occupation des lieux. Le projet permettra via notre building operating system de décaler les périodes de consommation pour les aligner sur les périodes de production et en ajustant la consommation sur les périodes tarifaires les plus intéressantes. Le surplus d’énergie de l’hôtel sera proposé au collectif, qui, à son tour, pourra proposer de l’énergie quand l’hôtel en manquera », raconte Alexandre Fund, qui assure aux clients un ROI en moins de cinq ans. « Avec l’autoconsommation collective, pour lequel nous assurons le circuit de la production d’énergie sur une zone, nous étendons notre expérience du tertiaire à la smart city », se félicite Pascal Zératès, CEO de Kardham Digital.

 

Pour l’heure, l’autoconsommation collective reste marginale en France, « qui compte actuellement 200 PMO », précise Gwénaëlle Carfantan, présidente fondatrice de la société Urban Think. Leur nombre pourrait grandir rapidement, l’autoconsommation collective étant un axe fort des bailleurs sociaux. « Nous observons de plus en plus de POC se mettre en place pour savoir comment flécher correctement les électrons, c’est la grande tendance sur le marché », assure Thomas Moulia, cofondateur de la green tech française Inicio, qui table sur une intensification des projets d’ACC ces trois prochaines années.

 

Célia Garcia-Montero